Intégrer les dépenses de sous-traitance au CIR s’avère complexe pour les entreprises déclarantes, d’autant plus que les dépenses de « recherche confiée » représentent souvent l’un des postes les plus importants de l’assiette du CIR. Pourtant, il manque une définition précise et commune de ces dépenses dans les textes légaux. De nombreuses entreprises – à la fois donneuse d’ordre et sous-traitantes – sont confrontées à un contrôle fiscal sanctionnant une interprétation hasardeuse de la prise en compte de la sous-traitance dans l’assiette du CIR. Dans cet article, nous décryptons la question en rassemblant les consignes laissées par la législation, le Guide du CIR, mais également la jurisprudence de la CAA de Nancy de Mars 2017 pour la SARL Biotek Agriculture.

Intégrer les dépenses de sous-traitance au CIR : que dévoile le Guide du CIR ?

Le Guide du CIR est l’ouvrage de référence publié par le MESRI (Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation) qui présente aux déclarants les attentes des autorités de contrôle en matière d’éligibilité des projets de R&D au dispositif et de dépenses intégrables à l’assiette du CIR.
Dans son édition 2018, le guide indique que, pour pouvoir comptabiliser les dépenses de sous-traitance au CIR, les opérations doivent répondre à certaines conditions :

  • correspondre à la réalisation d’opérations de R&D éligibles (le guide précise qu’une prestation sous-traitée qui n’est pas de la R&D n’est pas éligible au CIR même si elle est indispensable à la réalisation du projet)
  • avoir été réalisés en interne par le sous-traitant sur la totalité des travaux confiés sans possibilité d’en sous-traiter lui-même tout ou partie

En d’autres termes, cette précision stipule qu’une prestation sous-traitée qui ne constitue pas en elle-même une opération de R&D n’est pas éligible. Depuis, nous avons constaté que cette nouvelle exigence était particulièrement prise au sérieux par l’administration fiscale et les experts mandatés du MESRI lors des contrôles du CIR.

La position officielle transmise par la législation fiscale

Tout d’abord, l’article 244 quater B du Code Général des Impôts, qui est l’article de référence absolu en ce qui concerne la réglementation fiscale, indique que les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d’impôt sont :

  • Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l’état neuf et affectées directement à la réalisation d’opérations de recherche scientifique et technique
  • Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations
  • Les autres dépenses de fonctionnement exposées
  • Mais également, les dépenses exposées pour « la réalisation d’opérations de même nature » confiées à :
    • Des organismes de recherche publics
    • Des organismes de recherche privés agréés

Nous remarquons un manque de clarté dans la loi, qui s’exprime de manière assez brève sur l’intégration de la sous-traitance. Nous pouvons tout de même interpréter que « les opérations de même nature » signifie que les opérations éligibles traitées en interne sont identiques aux opérations éligibles sous-traitées.

Pour approfondir la question, la doctrine administrative du Bulletin Officiel des Finances Publiques et de l’Impôt (BOI-BIC-RICI-10-10-20-30-20170405) nous apporte quelques précisions supplémentaires. Elle indique ainsi que les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de recherche, confiées à des organismes de recherche publics, des organismes privés agréés ou à des experts scientifiques ou techniques agréés, sont retenues pour déterminer la base du crédit d’impôt. Sur ce point, cela n’apprend rien de plus que dans le CGI, hormis la prise en compte « d’experts scientifiques » indépendants comme sous-traitants.

Par ailleurs, plus loin dans le texte, nous lisons :

« dès lors qu’un projet est qualifié de projet de R&D, l’ensemble des opérations nécessaires à sa réalisation est considéré comme de la R&D, y compris dans le cas où ces opérations, si elles étaient prises isolément, ne constitueraient pas de la R&D » (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20-20161102, §310).

Ce point précis divise beaucoup les entreprises déclarantes ainsi que leurs accompagnants, car il est sujet à plusieurs interprétations possibles, y compris quand il est question d’intégrer la sous-traitance au CIR.
En tant que cabinet de conseil référencé, et avec près de 120 assistances à contrôles fiscaux, nous connaissons bien les attendus de l’administration fiscale. À ce titre, nous portons le regard suivant sur la question : le ministère de la recherche et l’administration fiscale ne peuvent pas séquencer artificiellement un projet global de CIR pour exclure des phases intrinsèquement liées au projet global et ce, même si isolément ces phases n’auraient pas été éligibles. Si en revanche, les phases sont de toute évidence « détachables » du projet d’ensemble et ne remplissent pas les conditions d’éligibilité (par exemple, les études techniques préparatoires de faisabilité), ces dernières peuvent être exclues par le ministère de la recherche et l’administration fiscale.

Dans le cas de la sous-traitance, cela soulève beaucoup d’interrogations quant aux dépenses réellement intégrables dans l’assiette du CIR. Nous avons en mémoire l’expertise réalisée par le MESRI à l’occasion du contrôle fiscal de l’un de nos clients. L’expert mandaté pointait le fait que des opérations de R&D nécessitant des compétences qui existent déjà dans la société déclarante ne peuvent pas être sous-traitées dans le cadre du CIR. De même que des opérations de R&D réalisées par du personnel détaché et mis à la disposition de la société déclarante ne peuvent pas être prises en compte comme de la sous-traitance.

Ce qu’a soulevé la jurisprudence de la SARL Biotek Agriculture

Le 23 mars 2017, les juges de la CAA de Nancy se sont exprimés sur l’éligibilité au CIR de travaux effectués par la société BIOTEK Agriculture, prestataire de service en expérimentation de produits destinés à l’agriculture.

« Il résulte de l’instruction qu’à l’appui de ses prétentions, la société requérante (ici SARL Biotek Agriculture, ndlr) se prévaut des différents travaux menés, en 2007, 2008 et 2009, pour le développement de deux pesticides […], que toutefois, la société requérante s’est bornée à tester les résultats des différentes recherches menées par les sociétés lui ayant demandé d’effectuer ces essais ; que ces essais ne peuvent être regardés comme constituant des opérations de recherche éligibles au crédit d’impôt recherche ; qu’au demeurant, comme il vient d’être dit, l’ensemble des essais menés par la SARL Biotek Agriculture […] l’ont été pour le compte de sociétés tierces ; qu’il s’ensuit que seules ces sociétés pourraient inclure les dépenses qu’elles ont ainsi supportées, en confiant ces opérations à la société requérante, parmi les dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche ; qu’il suit de là que la SARL Biotek Agriculture n’est pas fondée à demander, à raison du coût des prestations de services ainsi effectuées, le bénéfice du dispositif […] quand bien même les essais qu’elle a menés s’inscrivaient dans le cadre d’une démarche de développement expérimental et qu’ils étaient indispensables avant toute mise sur le marché des produits phytosanitaires ou la commercialisation des semences »

En d’autres termes, les juges considèrent que les dépenses de R&D « par rattachement » doivent aussi être considérées si elles sont sous-traitées, et pas seulement quand elles sont effectuées en interne. Cette jurisprudence confirme donc l’éligibilité des phases expérimentales et des tests sous-traités à un prestataire externe par le donneur d’ordre, dès lors que ces travaux sont nécessaires aux opérations de R&D internes. Ces activités devront être déclarées par le donneur d’ordre.

Cette jurisprudence date de 2017 mais ce point n’a toujours pas été tranché par une quelconque décision du Conseil d’Etat. Chaque juge ayant le droit d’établir sa propre interprétation d’un texte administratif, il se peut que les dépenses « de rattachement » sous-traitées soient considérées comme éligibles.
Cependant, la valorisation des dépenses de sous-traitance au CIR n’étant pas systématiquement validée par les autorités de contrôle, il faut donc se tenir prêt à défendre son dossier devant les juridictions administratives.

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Au travers du Guide du CIR, le Ministère de la Recherche (MESRI) publie des consignes à l’attention des déclarants. On retrouve notamment des précisions sur les attendus des autorités de contrôle (administration fiscale et MESRI) en cas de demande d’information et de contrôle fiscal du CIR. En Juin 2018, le MESRI a mis en ligne la version 2018 du Guide du CIR, accompagnée de la trame justificative des travaux de R&D – c’est-à-dire du modèle à suivre pour constituer le rapport scientifique. Dans cet article, nous revenons en détails sur ce qui a changé dans la nouvelle trame scientifique du CIR et sur l’impact qu’auront, d’après nous, ces modifications sur les futurs contrôles du CIR.

La constitution de l’état de l’art, désormais implicite

Dans la nouvelle trame scientifique du CIR, il n’est désormais fait mention nulle part de la nécessité de fournir l’état de l’art. On retrouve seulement une simple ligne dans le Guide du CIR 2018 : le préalable à une opération de R&D est l’étude et l’analyse des connaissances existantes et exploitables. Autrement dit, il n’est plus indiqué explicitement que le déclarant doive renseigner un état de l’art exhaustif de la littérature de son écosystème.
À notre sens, ce manque de précision est un véritable danger pour les déclarants qui ne possèdent pas une connaissance approfondie du dispositif. Nous encourageons avec insistance la simplification de l’état de l’art en ôtant les mentions à une littérature trop large, afin de n’indiquer que ce qui attrait à la problématique scientifique. Toutefois, nous insistons sur la nécessité de fournir un état de l’art. Le risque pour les déclarants est d’inclure des opérations qui ne sont pas éligibles, car ne correspondant pas à la résolution d’un verrou scientifique. En effet, si le déclarant n’est pas en mesure de prouver que les travaux ont été entrepris pour résoudre une incertitude technique ou scientifique, ceux-ci ne pourront en aucun cas donner lieu au CIR. Et par conséquent, sans état de l’art, il n’est pas possible de prouver qu’il y a bien un verrou à résoudre.

En Février 2019, nous avions eu l’occasion d’assister à un débat avec trois représentants du Ministère de la Recherche, durant lequel nous avons pu aborder la question de ce manque de clarté concernant l’état de l’art dans la nouvelle trame scientifique du CIR. La réponse apportée était la suivante : bien que la trame ne mentionne pas de devoir fournir un état de l’art, les déclarants doivent obligatoirement faire apparaître l’apport de la connaissance pour montrer le caractère original des opérations réalisées par rapport à l’existant. Cela montre bien une certaine ambivalence des attendus des autorités de contrôle … Selon nos informations, la suppression de l’état de l’art et de la bibliographie seraient dues au fait que les experts mandatés constatent une recrudescence de « l’inventivité » de certains déclarants et de leurs prestataires de conseil dans la rédaction de ces parties critiques. Autrement dit, la constitution d’un état de l’art superficiel sert régulièrement à contourner l’absence de verrous. Pour les experts mandatés, ces nouvelles consignes ont pour objectif de matérialiser plus lisiblement le véritable niveau des connaissances.

Une sélection rigoureuse des opérations retenues

La nouvelle trame scientifique du CIR explique désormais qu’un projet se décompose en opérations de R&D – terme copieusement repris dans le Guide du CIR 2018. Un même projet est découpable en différentes opérations relevant de la R&D ou non. Seules les opérations visant à lever un verrou sont valorisables au titre du CIR. En conséquence, seules les dépenses affectées à ces opérations pourront être comptabilisées dans l’assiette.
En outre, la trame fait référence à une « sélection » des opérations au titre du CIR, en indiquant aux déclarants qu’ils doivent « expliquer, en quelques lignes, les critères appliqués pour sélectionner les opérations retenues au tire du CIR » et surtout, « indiquer quelles étapes de l’opération ont été déclarées au CIR et quelles autres ont été écartées ». Il s’agit là d’une nouveauté qui précise clairement la nouvelle ligne de conduite adoptée par les autorités de contrôle. Il est désormais demandé aux déclarants un comportement vertueux pour montrer leur bonne foi. En expliquant ce qu’ils n’ont pas retenu et pourquoi, ils montrent ainsi leur bonne maîtrise des textes légaux et du dispositif, ce qui donne un a priori positif aux experts mandatés en cas de contrôle.
La trame demande de fournir la liste des personnels R&D, leur rôle dans les opérations retenues et le temps passé. L’objectif étant d’être capable de justifier de façon rigoureuse chaque opération, chaque projet, chaque sous-projet et chaque personnel de recherche dans la comptabilisation de l’assiette. Ce découpage par phases laisse pressentir une volonté claire du MESRI de faire le tri entre les taches éligibles et celles qui ne le sont pas.
Toutefois, nous relevons une contradiction entre cette nouvelle consigne et les textes légaux. Ceux-ci expliquent bien qu’une tâche demeure éligible au CIR même si, comptabilisée individuellement elle n’est pas éligible mais qu’elle est indispensable à la réalisation de l’opération. En effet, le Bulletin Officiel des Finances Publiques précise que : « dès lors qu’un projet est qualifié de projet de R&D, l’ensemble des opérations nécessaires à sa réalisation est considéré comme de la R&D, y compris dans le cas où ces opérations, si elles étaient prises isolément, ne constitueraient pas de la R&D » (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20-20161102 §310).

Un a priori positif légitimé par la présence d’indicateurs de R&D

Par rapport à la version précédente, la nouvelle trame scientifique du CIR souligne l’importance de se doter d’indicateurs de R&D forts. Autrefois reléguée en fin de rapport, la partie apparaît désormais en bonne place dans la présentation des opérations effectuées. La trame fournit également une liste plus exhaustive des indicateurs de R&D formels attendus :

  • publication ou communication dans un congrès ou journal
  • participation à l’encadrement d’une thèse (dont contrat CIFRE)
  • collaboration scientifique avec un organisme public
  • participation à un projet collaboratif
  • subventions de la France et/ou l’Union européenne
  • dépôt de brevet ou de logiciel (APP)
  • enveloppe Soleau

La position adoptée dans la nouvelle trame scientifique du CIR en ce qui concerne la présence d’indicateurs de R&D tangibles confirme la démarche que nous adoptons à l’égard de notre propre clientèle. En effet, nous mettons régulièrement en relation nos clients avec des acteurs publics et privés afin de faciliter l’obtention d’indicateurs tels que des projets de recherche partenariale.

Plus de rigueur dans l’intégration de la recherche confiée

Auparavant, le donneur d’ordre n’était pas tenu de préciser en détails les travaux confiés à un sous-traitant, du moment que ceux-ci étaient éligibles et que le sous-traitant privé était agréé. La nouvelle trame scientifique du CIR requiert dorénavant de renseigner attentivement la description de toutes les opérations sous-traitées. Le déclarant doit expliciter en quoi le sous-traitant a participé à la levée de verrous, en remplissant l’annexe 3 qui se situe à la fin de la trame.
Cette prise de position met fin à une relative permissivité qui a pu être observée quant à l’intégration abusive de travaux sous-traités mais non-éligibles.

Le changement de la nomenclature des domaines scientifiques

La nouvelle trame scientifique du CIR propose à présent une nomenclature très précise des différents domaines scientifiques considérés par les autorités de contrôle pour catégoriser les opérations réalisées. L’intérêt de cette nomenclature pour le déclarant est qu’en choisissant son champ principal et ses champs secondaires, il pourra impacter le choix de l’expert mandaté en cas de contrôle. Il a tout à gagner à voir affecter le bon expert, spécialiste du domaine précis de son projet.
De plus, le fait d’avoir plusieurs champs concernés par le projet atteste de sa complexité et donne un préjugé positif sur le caractère R&D.

Les indices donnés par la nouvelle trame scientifique du CIR sur les contrôles à venir

À la lecture de la nouvelle trame scientifique du CIR, nous n’observons aucun changement majeur dans les critères d’éligibilité. La grande nouveauté 2018 réside dans le formalisme demandé, qui prouve une augmentation des attendus et de la sévérité des agents de contrôle en cas de fraude. En effet, compte tenu de certaines dérives observées, les déclarants doivent montrer patte blanche auprès de l’administration fiscale.
Nous remarquons une surveillance assidue menée par l’administration fiscale sur les déclarants qui se sont éloignés des textes légaux. Cette surveillance se traduit par des demandes d’informations quasi systématiques et des contrôles en cas de doute.

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Le Crédit Impôt Recherche et le Crédit Impôt Innovation sont des mesures fiscales finançant l’effort de recherche ou d’innovation engagé par les entreprises implantées en France et assujetties à l’impôt. Bien qu’ils aient largement prouvé leur efficacité depuis la création du CIR il y a 35 ans, ces dispositifs sont de plus en plus attaqués sur leur complexité et leur aspect inégalitaire. Dans cet article, nous vous présentons nos observations révélant la nécessité d’une réforme du CIR/CII ainsi que notre proposition de solution.

Rappel : la procédure de déclaration et de contrôle du CIR/CII

Pour bénéficier du CIR/CII, l’entreprise dépose une déclaration CERFA 2069-A-SD en même temps que sa déclaration de résultats. Elle peut imputer son éventuel impôt sur le CIR et demander le remboursement « immédiat » de l’excédent si elle est une PME communautaire.
La procédure de remboursement du CIR par l’administration fiscale est généralement la suivante :

  • demande à l’entreprise d’un dossier justificatif
  • analyse du dossier par les services de l’administration fiscale
  • contrôle par la direction
  • mise en paiement du montant validé

Le délai de remboursement constaté s’étale entre 2 et 10 mois après le dépôt de la déclaration, sans visibilité pour le contribuable.
Dans un second temps, un contrôle fiscal du CIR peut intervenir jusqu’à 4 ans après le dépôt de la déclaration. Il est réalisé par un agent de l’administration fiscale qui mandate ou non un expert du Ministère de la Recherche (MESRI). Le contribuable remet le dossier justificatif à l’administration qui le transmet à l’expert. Après un certain délai non déterminé, l’expert rend son rapport. Celui-ci peut donner lieu à une demande d’informations complémentaires, un débat contradictoire et/ou à une contre-expertise et enfin aller jusqu’à une audition en Comité consultatif. La durée d’un contrôle du CIR peut s’étendre de 3 à 15 mois, parfois plus.

La subjectivité des contrôles du CIR/CII

Ces dispositifs fiscaux, tant dans leur utilisation que dans leur mise en œuvre opérationnelle, sont des mesures complexes et délicates. Leur justification repose sur un volet financier (détermination des dépenses éligibles, justification des dépenses) ainsi que sur un volet scientifique (descriptif technique d’une opération de R&D). Cela est d’autant plus difficile à appréhender que les exigences de l’administration fiscale et du MESRI évoluent régulièrement, notamment entre le moment de la déclaration et le moment du contrôle. Le déroulement des contrôles (le niveau de connaissances disparate des contrôleurs, la durée du contrôle, les débats qui peuvent être orientés, l’évolution des exigences de la part du MESRI) et les éventuels redressements fiscaux font souffrir tant les entreprises que l’administration. Bien qu’un Comité Consultatif du CIR ait été mis en place depuis Janvier 2016 pour traiter les cas litigieux, il n’est pas rare de constater des situations véritablement compliquées et douloureuses pour les entreprises.

Réforme du CIR/CII : ce qui coince côté Entreprises

Bien souvent, les entreprises bénéficiaires et leur prestataire établissent les dossiers CIR à l’aide de tableurs et de traitement de texte. Ces outils ne permettent pas de répondre à l’intégralité des besoins et exigences attendus par le déclarant.
Les dossiers établis n’ont ainsi pas de structure homogène et sont déterminés avec des règles de calcul inégales voire fausses.
Par conséquent, le temps de constitution et de gestion des dossiers pour l’entreprise peut varier du simple au triple entre deux dossiers présentant des assiettes de CIR d’un même montant. Les erreurs matérielles, les pertes d’informations et la non exhaustivité des documents nécessaires sont monnaie courante.

Réforme du CIR/CII : ce qui coince côté Administration fiscale

Les agents de l’administration fiscale et les experts du Ministère de la Recherche utilisent également tableurs et logiciels de traitement de texte pour réaliser les contrôles. Là aussi, ces outils ne peuvent répondre aux besoins des contrôleurs et à leur mission de contrôle de l’utilisation de l’argent public.
Cela laisse place à un contrôle du CIR réalisé à la marge, coûteux, long, fastidieux et consommateur de temps. Du côté du MESRI, il est un constat de l’existence d’un goulot d’étranglement sérieux quant au nombre d’experts habilités.
Du fait d’un contrôle très a posteriori, le risque de dilapider l’argent public est élevé. En effet, ces procédures de contrôles tardifs se révèlent onéreuses, en moyen financiers et humains.
Le niveau inégal de connaissances ou d’exigences des contrôleurs et/ou des experts mandatés face à la complexité du dispositif est dommageable, particulièrement lorsqu’ils valident des montants non-dus, ou à l’inverse, privent des entreprises du CIR dont elles ont droit. Dans le même temps, les délais de réalisation des contrôles/expertises s’allongent significativement.
Cela engendre un climat de tension avec les contribuables et l’apparition d’organismes financiers qui proposent de financer le CIR entre la date de dépôt de la déclaration et la date de remboursement.

L’utilisation d’un outil commun de référence

Nous constatons l’absence de réels outils mis à la disposition tant des entreprises que de l’administration pour déclarer et contrôler, et estimons donc qu’une réforme du CIR/CII serait nécessaire.
Les entreprises déclarantes et le gouvernement français ne peuvent que constater les dérives dans la gestion, la déclaration et le contrôle du CIR : une enveloppe globale du CIR déjà colossale et difficilement maîtrisable, un gaspillage de temps et d’argent, un allongement des délais de traitement, de paiement et de contrôle, etc. À cela s’ajoute des contrôles non systématiques, difficiles, peu satisfaisants pour les parties, voire partiaux.
Les coûts déclaratifs, de contrôle et de non contrôle représentent des centaines de millions d’euros pour le gouvernement et les entreprises.
Notre analyse pointe qu’il manque un outil de production d’un dossier de CIR standardisé, dématérialisé et sécurisé qui permette un contrôle en amont et en aval de façon rapide, fiable et exhaustive.

Pour aller plus loin

Pour devancer une éventuelle réforme du CIR/CII, nous œuvrons depuis plus de trois ans au développement de CIRexpert, un outil de production du CIR/CII/JEI de manière structurée, économique et sécurisée. N’hésitez pas à nous contacter pour en savoir plus ou bien nous rejoindre sur Linkedin !

Le guide du CIR est un document édité chaque année par le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) visant à aider les entreprises éligibles au Crédit Impôt Recherche à bien appréhender les textes officiels. Il constitue une référence commune mais n’a aucun poids juridique. En effet, ce guide, dont la dernière version a été publiée le 29 Août 2018, n’a pas de valeur officielle et n’est pas opposable à l’administration en cas de litige. Cependant, il s’agit d’une aide précieuse pour l’entreprise déclarante. Le guide du CIR 2018 ne présente pas de différences majeures avec le document de l’année dernière. Cependant, nous avons identifié quelques nouveautés que nous vous présentons ici.

Une analyse plus fine des activités de R&D

De manière générale, l’édition 2018 laisse transparaître une plus grande exigence de l’administration fiscale vis-à-vis de la qualité des dossiers scientifiques à fournir. Ainsi, le guide du CIR 2018 n’emploie plus les termes de « projets de R&D » mais « d’opérations de R&D », mettant ainsi en évidence la nécessité d’évaluer avec précision l’éligibilité de chaque phase du projet et non pas du projet dans son ensemble. Cette exigence n’est pas nouvelle mais elle n’avait pas été formulée aussi clairement ni avec autant d’insistance par l’administration. Le schéma suivant, semblable à celui que l’on retrouve dans le guide du CIR 2018, résume bien ce besoin d’identifier précisément les tâches éligibles au sein d’un projet.

guide du CIR 2018

En d’autres termes, l’administration fiscale souligne la nécessité de morceler avec vigilance les différentes phases d’un projet, puis de décrire de manière précise les opérations de R&D effectuées dans le dossier technique.

Une définition plus précise de la R&D

Comme chaque année, le guide détaille ce que l’administration fiscale entend par « R&D », en apportant une définition du type de projet attendu. Cependant, cette définition a été largement étoffée dans la version 2018. Ainsi, l’administration fiscale décrit cinq critères pour évaluer l’éligibilité d’une activité de R&D au CIR, qui doit désormais :

Comporter un élément de nouveauté

« la R&D désigne la création structurée de connaissances, y compris de connaissances intégrées dans des produits et procédés, ce sont ces nouvelles connaissances, et non les produits ou procédés nouveaux ou fortement améliorés résultant de leur application qu’il convient de mesurer »

Comporter un élément de créativité

 « appliquer des concepts nouveaux ou des idées nouvelles de nature à améliorer l’état des connaissances doit faire partie d’une opération de R&D »

Comporter un élément d’incertitude

« la probabilité de résoudre la difficulté rencontrée, ou la façon d’y parvenir, ne peut être connue ou déterminée à l’avance »

Être systématique

« la R&D est une activité structurée […], les modalités de conduite de la R&D ont été planifiées et son déroulement et ses résultats sont consignés »

Être transférable et/ou reproductible

« une opération de R&D devrait déboucher sur la possibilité de transférer les nouvelles connaissances acquises, […] en permettant à d’autres chercheurs de reproduire les résultats obtenus dans le cadre de leurs propres activités de R&D. Cela inclut les activités de R&D qui débouchent sur des résultats négatifs. […] Le but de la R&D est d’enrichir le stock de connaissances, ses résultats ne doivent pas rester tacites (c’est-à-dire être cantonnés dans l’esprit des chercheurs). […] Il est d’usage de consigner au moins en interne le déroulement de l’activité et ses résultats à l’intention des autres chercheurs spécialistes du domaine ».

Nous attirons votre attention sur le fait que la notion de « structure » de l’activité est nouvelle et implique donc une mise en avant nécessaire dans votre dossier justificatif du CIR de la démarche utilisée pour mener à bien vos opérations de R&D. Nous retrouvons également la notion de « publication des résultats de recherche », qui n’était pas mise en avant de manière aussi prononcée les années précédentes. La publication scientifique fait partie intégrante du processus de recherche dans tout laboratoire académique et il devient évident, à travers ce guide du CIR 2018, que l’administration exige une démarche similaire des entreprises dans le cadre de leurs activités de R&D.

Le guide renforce également les définitions des trois types d’activités éligibles : la recherche fondamentale, la recherche appliquée et le développement expérimental. Ces précisions soulignent une fois de plus l’importance de la présence d’indicateurs de R&D. Il est ainsi précisé que « les résultats de la recherche fondamentale sont, non pas cédés, mais publiés dans des revues scientifiques ou communiqués aux confrères intéressés ». Il est également rappelé que toute activité de R&D quelle qu’elle soit doit avoir pour but la production de nouvelles connaissances pour la communauté scientifique.

La spécificité de certains domaines

Une nouveauté de la version 2018 concerne la précision des critères d’éligibilité pour trois domaines scientifiques particuliers : les essais cliniques, l’archéologie et l’informatique. Pour les deux premiers, il s’agit essentiellement de préciser les phases éligibles. Pour l’informatique, l’évaluation de l’éligibilité d’une activité est plus complexe et trois catégories d’opérations éligibles sont listées :

Une amélioration de la technique

« les opérations de R&D ayant créé une technique prouvée originale et/ou meilleure de celles existantes : la technique elle-même est décrite et pourrait être réutilisée »

Une amélioration de la méthode

« les opérations de R&D ayant défini une méthodologie prouvée originale et/ou meilleure de celles existantes. Il peut s’agir de la conception d’une nouvelle méthodologie ou d’une nouvelle stratégie de développement de logiciels […] »

Une amélioration du savoir-faire

« l’amélioration du savoir-faire concernant des concepts ou technologies existants mais récents et dont le savoir-faire concernant l’utilisation ou l’application n’est pas encore établi et pose de réels problèmes »

Les voies de recours en cas de litiges

La partie traitant des voies de recours en cas de litige n’est pas nouvelle mais s’est considérablement étoffée dans le guide du CIR 2018. Cela n’est pas sans lien avec la forte augmentation du nombre de contrôles, ainsi que le durcissement des exigences de l’administration vis-à-vis de la qualité des dossiers fournis ; tendance que nous observons au quotidien dans l’accompagnement de nos clients.

Le Comité Consultatif du CIR, qui a été initié en 2016, obtient son passage dans la version 2018, au même titre que le recours à un médiateur des finances publiques et à un médiateur des entreprises.
Ainsi, la version 2018 du guide insiste fortement sur l’importance du dossier à fournir en cas de participation à un Comité Consultatif du CIR. Ainsi, il est rappelé que ce dossier doit être synthétique, clair, ne porter que sur les activités soumises à litige et apporter des éléments scientifiques et techniques supplémentaires. Ces exigences ne sont pas nouvelles mais l’insistance de l’administration sur ces points met bien en évidence la tendance actuelle de renforcement des contrôles des dossiers de CIR. D’où l’importance de produire des dossiers de qualité ainsi que d’être bien accompagné par son cabinet de conseil en CIR.

Le guide du CIR 2018 n’apporte donc pas de changements fondamentaux dans l’interprétation des textes légaux encadrant le dispositif, mais met fortement l’accent sur la nécessité de respecter rigoureusement les critères d’éligibilité établis.

Une forte augmentation des exigences vis-à-vis de la qualité des dossiers technique et de la sélection des phases éligibles transparaît de ce document et se traduit de manière concrète par des contrôles plus nombreux et plus stricts.

En savoir plus ?

Au vue de ces nouvelles précisions, l’accompagnement par un cabinet de conseil de qualité a donc toute son importance. N’hésitez donc pas à nous contacter pour obtenir l’expertise de notre équipe ou à rejoindre notre communauté de professionnels sur Linkedin.

Nous vous présentions récemment les montants déductibles du CIR. Aujourd’hui, il est question de la prise en compte de la mutuelle dans le calcul du montant du CIR. En effet, les dépenses de prévoyance complémentaire rendues obligatoires par la loi ou les conventions collectives, dont la mutuelle, peuvent-elles être prises en compte dans l’assiette du CIR (Crédit Impôt Recherche) ? La réponse expliquée par nos experts dans cet article !

Rappel : Les dépenses de personnel et les cotisations sociales éligibles au CIR

Conformément à l’article 49 septies I de l’annexe III du CGI, les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche doivent être retenues pour déterminer l’assiette du CIR lorsqu’elles correspondent aux rémunérations et leurs accessoires, ainsi qu’aux charges sociales dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations obligatoires.

Pour la part salariale, les salaires proprement dits, les avantages en nature, les primes et les cotisations sociales obligatoires sont donc des dépenses éligibles au CIR. La part patronale comprend quant à elle :

  • les dépenses de sécurité sociale (maladie, maternité, invalidité, décès, accident du travail, etc)
  • les dépenses d’assurance chômage et de l’AGS
  • les dépenses de caisse de retraite complémentaire

À l’inverse, les cotisations sociales suivantes ne sont pas considérées comme éligibles au CIR :

  • les taxes assises sur les salaires (taxe d’apprentissage, participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue et à l’effort de construction)
  • les autres dépenses de personnel qui sont déjà prises en compte comme dépenses de fonctionnement.

La jurisprudence considère la mutuelle comme une dépense éligible au CIR

En effet, le Tribunal Administratif de Paris, vient de préciser que l’accord d’entreprise instituant ce régime, est «obligatoire pour tous ses signataires» selon les dispositions de l’article L.2262-1 du Code du Travail combinées à l’article L.911-1 du Code de la Santé Publique. L’administration fiscale n’a pas fait appel de cette décision rendue. Par conséquent, la mutuelle instituée par une convention ou un accord collectif doit être regardée comme une cotisation sociale au sens du CIR, et donc comme une dépense éligible et intégrable dans son assiette.

Source : Tribunal Administratif de Paris, n° 1301796/2-3, 6 mars 2014, Société Lectra

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En 35 ans d’existence, le Crédit Impôt Recherche (CIR) a beaucoup évolué et surtout, il a participé, de manière plus ou moins directe, à de nombreuses avancées scientifiques et techniques. Aujourd’hui, il remplit avec toujours plus d’efficacité la tâche pour laquelle il a été créé en 1983 : soutenir les entreprises françaises dans leurs travaux de R&D et d’innovation. À l’occasion de ce 35ième anniversaire, nous revenons pour vous sur l’historique de ce dispositif.

Les 35 ans du Crédit Impôt Recherche : des mutations progressives depuis 1983

Octobre 1982 marque les prémisses du Crédit Impôt Recherche. Durant les Journées Nationales de l’ANVAR (Agence Nationale de Valorisation de la Recherche), le Premier Ministre de l’époque, Pierre Mauroy, évoque la possible création d’un crédit d’impôt pour les travaux de recherche. À la fin de cette même année, la loi des Finances promulguée concrétise le CIR, un dispositif fiscal qui prend effet dès l’année 1983. Initialement, ce nouveau dispositif était fixé à 25 %, dans la limite d’un plafond de 3 millions de francs (460.000 €). Son premier objectif était de permettre aux entreprises de financer l’accroissement de leurs dépenses en R&D, durant une année. Rapidement, ce délai passe à trois, puis cinq ans.

En 1985, la loi sur la R&D technologique rehausse le taux du Crédit Impôt Recherche à 50 %, avec un plafond de 5 millions de francs (770.000 €). À partir de 1988, il couvre également les dépenses de brevets acquis pour les travaux de recherche, ainsi que les dépenses de normalisation (en 1990).

La loi de Finances de 1991 marque un nouveau tournant. Le calcul du CIR correspond désormais à la différence entre les dépenses de l’exercice et la moyenne de celles des deux années qui précèdent. Les frais de fonctionnement passent à 75 % des dépenses de personnel. Le plafond connaît une hausse spectaculaire à 40 millions de francs (6 millions €). L’année suivante, le dispositif est étendu aux entreprises agricoles et aux réalisations de collections d’habillement.

La loi sur l’Innovation et la Recherche de juillet 1999 apporte ensuite quelques améliorations au dispositif, en faveur de l’emploi. L’embauche de docteurs (ou de personnel de diplôme équivalent) en CDI, au sein d’entreprises innovantes, est prise en charge durant deux ans, à condition que les effectifs de la société croissent. C’est ce que l’on appelle aujourd’hui le statut « Jeune Docteur ».

La loi de Finances de décembre 1999 poursuit la mutation progressive du Crédit Impôt Recherche. Celui-ci devient égal à 50 % de l’accroissement des dépenses de R&D, entre l’année de déclaration et la moyenne des deux années qui précèdent. Sa restitution immédiate est possible aux sociétés (réellement nouvelles et indépendantes) créées dans l’année en cours.

La loi de Finances de décembre 2003 rend l’option du CIR annuelle et scinde les dépenses en deux parties. La première concerne l’accroissement de celles en R&D, la seconde celles « en volume ». La loi de Finances de 2008 ne retiendra plus que ce dernier type de dépenses pour le calcul du CIR. En outre, le crédit d’impôt passe à 30% des dépenses de R&D, jusqu’à 100 millions d’euros, et 5% au-delà. Ce seuil est toujours en vigueur à l’écriture de ces lignes.

Le Crédit Impôt Recherche, un dispositif de plus en plus controversé

Les premières critiques vis à vis du CIR émergent en juillet 2009. Un rapport réalisé par l’Assemblée nationale (sur l’application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances et dans la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat) met en évidence le coût élevé du dispositif qui, bien qu’efficace, profite majoritairement aux grandes entreprises. L’année suivante, le Sénat réalise le même constat dans un compte-rendu d’information.

Le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale sur le CIR, publié en juillet 2010, préconise des améliorations du dispositif, compte tenu de l’accroissement important du nombre d’entreprises bénéficiaires. En juillet 2012, dans son rapport d’information, le sénateur Michel Berson préconise de supprimer le CIR aux grandes entreprises et de le recentrer sur les PME.

En octobre 2012, Alain Claeys, rapporteur spécial du budget de la recherche auprès de la Commission des finances de l’Assemblée Nationale, décrit une fois de plus l’utilisation du CIR comme outil d’optimisation fiscale pour les grandes entreprises, à défaut d’être l’outil privilégié des TPE/PME .

En septembre 2013, un rapport de la Cour des comptes énonce que le montant des dépenses en R&D des entreprises françaises reste stable depuis 2008, alors que les CIR obtenus ont triplé (passant de 18 millions à 5,8 milliards d’euros par  an), sans pour autant favoriser l’emploi. Il préconise en outre une dématérialisation du CIR pour faciliter les contrôles fiscaux.

En octobre 2014, 660 directeurs de laboratoires du CNRS, de l’INSERM, l’INRA, l’INRIA, IRSTEA, IRD et du CEA adressent une lettre à François Hollande, intitulée « Urgence pour l’emploi scientifique », afin d’impulser une réforme pour améliorer le dispositif. En juin 2015, le rapport de la Commission d’enquête sénatoriale sur la réalité du détournement du Crédit d’Impôt Recherche n’est finalement pas publié. À ce jour, malgré les demandes de toutes parts, aucune loi prévoyant une amélioration du dispositif n’est en préparation.

Les deux années suivantes, les entreprises françaises assisteront à une augmentation du nombre de contrôles fiscaux portant sur le CIR, en parallèle à un durcissement des sanctions en cas d’infractions. En 2016, nous vous évoquions les changements dans la législation du CIR, tandis que le rescrit roulant du CIR voyait le jour, pour permettre une sécurisation des demandes de CIR. Enfin, des rectifications et précisions en matière de Crédit Impôt Recherche seront également données en 2017, comme nous vous l’expliquions dans notre précédent article.

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En France, l’actualité du Crédit Impôt recherche (CIR) est régie par les mises à jour de la loi, de la jurisprudence et du Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP-Impôts), qui est une base documentaire regroupant l’ensemble des commentaires de la législation fiscale publiés par la Direction générale des Finances Publiques. Mais au-delà des textes officiels, c’est aussi l’état d’esprit de l’administration fiscale qui conditionne l’actualité du CIR. Alors que l’année 2017 s’achève, revenons à présent sur ces nouveautés en matière de Crédit Impôt Recherche qui nous ont le plus marqué.

 

La redéfinition de la notion de chercheurs et techniciens

Toujours d’actualité, bien que datés de décembre 2016, les deux commentaires du BOFIP-I sur la redéfinition des notions de chercheurs et techniciens éligibles au Crédit Impôt Recherche.
Pour rappel :
Les chercheurs sont des scientifiques ou des ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs, les salariés qui, sans remplir les conditions de diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise,
Les techniciens de recherche sont les personnes, et ce quelle que soit leur qualification, qui travaillent en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental. Sont assimilés aux techniciens de recherche les stagiaires et les apprentis.
La mise à jour du texte de référence reconnaît désormais la qualité de scientifique aux titulaires d’un diplôme de niveau master au minimum ou d’un diplôme équivalent

 

L’éligibilité du personnel mis à disposition

Une décision du Conseil d’Etat datant de fin janvier 2017, (CE, 25/01/2017, n°390652), a précisé que le personnel mis à disposition à une entreprise affecté à des opérations de recherche dans ses locaux et avec ses moyens de recherche était éligible dans l’assiette du CIR de l’entreprise bénéficiaire.
Nous conseillons la signature d’une convention de mise à disposition de personnels fixant les modalités d’intervention.
Les dépenses à prendre en compte dans l’assiette du CIR sont les rémunérations et les charges sociales des personnels de recherche concernés, à l’exclusion des frais indirects (frais de gestion de personnel, d’administration générale) qui ne sont pas visés par le II de l’article 244 quater B du CGI.

 

Des précisions sur le statut de Jeune Docteur

Fin 2016, l’administration a apporté quelques précisions favorables sur le statut de Jeune Docteur.
Pour rappel, les dépenses de personnel relatives à des personnes titulaires d’un doctorat tel que défini à l’article L. 612-7 du code de l’éducation, ou d’un diplôme équivalent, sont prises en compte pour le double de leur montant (pendant les vingt-quatre premiers mois suivant le premier recrutement, c’est-à-dire le premier contrat de travail à durée indéterminée (CDI) conclut postérieurement à son doctorat par un jeune docteur et pour des fonctions liées à son niveau de diplôme, quel que soit le lieu de recrutement, en France ou à l’étranger) à condition que :

  • le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée
  • l’effectif salarié de recherche de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente

De plus, le doctorat est un titre garantissant une expérience de recherche ainsi que la rédaction et la soutenance d’un mémoire ou d’une thèse. Ce diplôme national est l’unique diplôme de niveau Bac+8, plus haut niveau du référentiel européen de Bologne. Ne sont donc pris en compte que les titres et diplômes conférant le grade de docteur ou leur équivalent international (PhD, etc.), excluant ainsi les diplômes d’État de docteur (médecine, pharmacie, vétérinaire, dentiste).

  • Les nouveautés mises en place dans le texte de référence concernent les points suivants :
  • Lorsqu’un premier CDI prend fin au cours de la période d’essai prévue à l’article L. 1221-19 du code du travail, il n’est pas compté comme un premier recrutement pour l’application du b du II de l’article 244 quater B du CGI. Sachant que cette tolérance n’est admise qu’une fois.
  • Un emploi au sein d’un organisme public sous un statut équivalent à un CDI (statut de fonctionnaire dans une université par exemple) n’est pas assimilable à un premier recrutement.
  • Le délai de 24 mois est suspendu pendant la durée d’absence du jeune docteur pour cause de maladie, de maternité, d’adoption ou d’accident du travail.
  • Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur (notamment par succession, vente, fusion, transformation de fonds, mise en société de l’entreprise, etc) tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. Le nouvel employeur pourra bénéficier des avantages fiscaux liés à la situation de jeune docteur pour la période d’éligibilité au doublement d’assiette restant à courir à la date d’effet du changement de situation juridique.

 

L’assiette des dépenses de personnel

Quelques décisions et commentaires sont venus préciser les éléments de rémunération entrant dans l’assiette du CIR.
Pour rappel, les dépenses de personnel retenues comprennent les rémunérations et leurs accessoires, ainsi que les charges sociales dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations obligatoires. Ainsi, sont donc pris en compte :

  • les salaires proprement dits
  • les avantages en nature et les primes
  • les indemnités de congés payés
  • les rémunérations supplémentaires et justes prix au profit des salariés auteurs d’une invention résultant d’une opération de recherche
  • les cotisations sociales obligatoires.

En revanche, sont exclues certaines cotisations sociales « non obligatoires » :

  • les cotisations et contributions correspondant à des impositions de toute nature telles que la contribution solidarité autonomie et la contribution exceptionnelle associée visées à l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles
  • les taxes assises sur les salaires (taxe d’apprentissage, participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue et à l’effort de construction, la contribution au développement de l’apprentissage et la contribution supplémentaire à l’apprentissage)
  • la contribution patronale visée à l’article L. 137-13 du CSS
  • le forfait social prévu à l’article L. 137-15 du CSS
  • la cotisation au fonds national d’aide au logement en application de l’article L. 834-1 du CSS
  • le versement transport prévu à l’article L. 2531-2 du code général des collectivités locales
  • les versements suivants :
    • les subventions versées pour le fonctionnement du comité d’entreprise
    • les contributions au financement des organisations professionnelles et des organisations syndicales
    • la contribution versée à l’association pour l’emploi des cadres (APEC) prévue par la convention APEC du 18 novembre 1966
    • les contributions versées à la médecine du travail (C. trav., art. L. 4622-6)
    • la contribution exceptionnelle temporaire (CET) versée à l’AGIRC et visée à l’article 2 de l’annexe III à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947
    • la contribution AGEFIPH (C. trav., art. L. 5212-9)
    • la contribution sur les avantages de préretraite prévue à l’article L. 137-10 du CSS

Voici les nouveautés et précisions sur les éléments à inclure dans l’assiette éligible apportées par la mise à jour du texte de référence :

  • les cotisations sociales de prévoyance complémentaire
  • l’intéressement et la participation
  • la participation de l’employeur à l’achat de titres restaurants
  • les abondements de l’entreprise au Plan Epargne Entreprise et au Plan d’Epargne pour la Retraite Collectif

Reste à exclure le Forfait social prévu à l’article L 137-15 du Code de la sécurité sociale, les versements au FNAL, les contributions destinées à l’APEC et de la CET versées à l’AGIRC.

 

Les procédures de sécurisation du CIR

Pour rappel, les entreprises peuvent se sécuriser leur CIR en procédant soit à un rescrit soit à un contrôle sur demande.
Le rescrit correspond à demander à l’avis à l’administration fiscale sur l’éligibilité de tout projet de R&D ou d’innovation. La demande est à déposer au plus tard six mois avant la date limite de dépôt de la première déclaration de CIR relative à ce projet, auprès de l’administration fiscale, à la DRRT ou à l’ANR. L’absence de réponse dans un délai de 3 mois vaut acceptation. Le principe suivant à respecter est d’un projet par demande.
Le contrôle sur demande est la possibilité pour l’entreprise de solliciter un contrôle sur son CIR. Le MESR est sollicité pour apprécier l’éligibilité des travaux.
Concernant ces procédures de sécurisation du CIR, les nouveautés suivantes entrent en vigueur :

  • Il est possible de faire une demande portant sur un projet de R&D et les dépenses éligibles associées. Cette possibilité est ouverte aux petites entreprises, dont le chiffre d’affaires est inférieur à 1.5 M€ pour les entreprises de négoce et à 450 k€ pour les entreprises de services,
  • Instauration depuis le 01/10/2016 d’un rescrit roulant qui ne s’applique que pour les projets de R&D pluriannuels pour lesquels un premier avis a été obtenu. La demande est à faire à l’administration fiscale.

 

La création d’un Comité consultatif du CIR

Pour rappel, l’administration fiscale peut vérifier le CIR déclaré jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle du dépôt de la déclaration 2069 de CIR. Le contrôle peut donc porter sur le CIR imputé ou le CIR ayant été remboursé, le remboursement ne valant pas validation du CIR.
La nouveauté suivante a été actée : à partir des propositions de rectifications adressées à compter du 01/07/2016, les entreprises et l’administration peuvent soumettre le litige qui les oppose à l’avis d’un Comité consultatif du CIR.
Le désaccord porte sur la réalité de l’affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR. Il peut se prononcer sur les faits susceptibles d’être retenus pour l’examen de cette question. Le comité est présidé par un conseiller d’Etat et composé d’un agent de l’administration fiscale, d’un agent du MESR et éventuellement d’un expert disposant des compétences techniques nécessaires. Le contribuable et ses conseils (1 ou 2) ainsi que les agents ayant pris part aux rectifications sont invitées à se faire entendre.
L’entreprise est convoquée trente jours au moins avant la date de la réunion du comité. Le comité peut préalablement à la séance, demander aux services du MESR un rapport complémentaire d’expertise technique sur la qualification des dépenses de recherche. Ce rapport est communiqué à l’entreprise et à l’administration fiscale dans un délai raisonnable avant la tenue de la séance.
Le comité, qui intervient en tant qu’organe consultatif, formule un avis qui est notifié par l’administration au contribuable. Celle-ci l’informe en même temps du chiffre qu’elle se propose de retenir comme montant du crédit d’impôt. Nous commençons à avoir des retours d’expérience sur le fonctionnement de ce comité ayant nous même assisté à l’un d’entre eux. Retrouvez notre article Nous avons testé pour vous … le Comité consultatif du CIR pour en savoir plus.

 

La non-éligibilité des dépenses

Une décision rendue en mai 2017 par la Cour administrative d’appel de Paris met en évidence deux points sensibles :

  • Les dépenses de participation financière en vue de réaliser un projet de R&D ne constituent pas des dépenses de sous-traitance éligibles.
  • Les dépenses de personnel relevant essentiellement de temps de pilotage (domaine de la stratégie, de l’organisation, du suivi et de la coordination, participation à des comités opérationnels, comités de pilotage, comités d’experts et autres réunions de groupe de travail) ne sont pas éligibles au CIR.

 

Les obligations déclaratives

Début 2017, l’administration a mis à jour sa base BOFIP concernant les obligations déclaratives du CIR (BOI-BIC-RICI-10-10-60)
Pour déposer leur déclaration de CIR, les entreprises ont le choix entre la procédure papier (deux destinataires, l’administration fiscale et le ministère de la recherche) ou la procédure dématérialisée (un destinataire).
La déclaration papier est à déposer auprès du service des impôts dont l’entreprise dépend avec le relevé de solde d’impôt sur les sociétés n°2572-SD. Le montant du CIR est reporté sur la déclaration des réductions et crédits d’impôts n°2069-RCI-SD à joindre à la liasse fiscale.
De quoi alourdir encore la démarche du CIR, donc. Nous rappelons qu’avec notre outil CIRexpert, c’est la totalité du dossier financier et scientifique qui peut être dématérialisé !

 

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L’équipe d’Innovatech Conseil accompagne les TPE/PME, les Jeunes Entreprises Innovantes et les start-up à interpréter les textes légaux et la jurisprudence ainsi qu’à vivre un contrôle fiscal du Crédit Impôt Recherche de manière sereine. Pour cela, il suffit de prendre contact avec nous.

 

En France, l’actualité du Crédit Impôt recherche (CIR) est régie par les mises à jour de la loi, de la jurisprudence et du Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP-Impôts), qui est une base documentaire regroupant l’ensemble des commentaires de la législation fiscale publiés par la Direction générale des Finances Publiques.
Mais au-delà des textes officiels, c’est aussi l’état d’esprit de l’administration fiscale qui conditionne l’actualité du CIR. En effet, l’augmentation considérable des montants de CIR attribué, plus de 5 milliards d’euros en 2016, a fait réagir les pouvoirs publics. Ceux-ci sont désormais plus vigilants, en effectuant des contrôles plus poussés avec des exigences supérieures.
Alors que l’année 2016 s’achève, revenons à présent sur ces évolutions en matière de Crédit Impôt Recherche qui nous ont le plus marqué. 

L’évolution de l’état d’esprit de l’administration fiscale

En 2016, dans le prolongement de l’année 2015, le nombre de contrôles a crû considérablement. Ces dernières années, si l’on avait pu assister à un certain manque de vigilance, on a pu constater dernièrement un durcissement des exigences avec des vérifications plus approfondies. Désormais, l’administration fiscale n’hésite pas à recourir à des redressements, avec des prises de positions parfois rigides voir lapidaires. Sur quelques cas, même lorsque le dossier est irréprochable, des rejets totalement arbitraires sont formulés par l’administration fiscale.
La jurisprudence met bien en lumière cette intransigeance des pouvoirs publics lorsqu’il s’agit de se prononcer sur l’éligibilité d’un projet. Nous pouvons citer le cas de notre ancien client, sur lequel la Cour Administrative d’Appel (CAA) de Marseille a rendu son jugement le 15 décembre 2016, pour des faits remontant à 2010.  Notre client, une association dite loi 1901, s’était vu refusé en décembre 2011 le remboursement de son CIR 2010 par l’administration fiscale. Celle-ci s’appuyait sur l’avis rendu par la Direction Régionale de la Recherche et de la Technologie (DRRT), qui énonçait que l’activité de cette association ne rentrait pas dans le champ d’application du CIR. Le 19 Mai 2015, le Tribunal Administratif avait confirmé la position prise par l’administration fiscale.
L’association plaignante invoquait par ailleurs l’incompétence de la DRRT, qui devait statuer sur l’éligibilité de l’association au CIR. Cette dernière accusait également les décisions rendues entachées d’un « défaut de motivation »  et d’une procédure comportant de nombreuses irrégularités qui portaient atteinte aux droits de la défense.
La CAA a décidé d’annuler le premier jugement et d’attribuer la restitution des montants de CIR en jeu et même le versement par l’Etat de dommages et intérêts. (CAA de Marseille, 3ème chambre, 15 décembre 2016, n°15MA03234).
Nous constatons que l’administration fiscale joue avec les délais lors du versement des montants de CIR. Pour notre association cliente, la bataille juridique a été longue, avec un engagement significatif de temps, d’argent et d’énergie et la mobilisation d’une équipe juridique et administrative. Sur la ligne d’arrivée, certes, l’association a gagné son procès 6 ans après. Mais à ce jour, elle attend encore le versement du montant de son CIR.
L’environnement du CIR est un système en proie à une relative dualité : l’administration fiscale n’est pas soumise aux contraintes de temps et de besoin de trésorerie qui pèsent elles, sur les entreprises du secteur privé.

 

L’éligibilité des projets au CIR

Les mises à jour de la base du BOFiP-Impôts ont été nombreuses en 2016. Nous remarquons une certaine stabilité au sujet des définitions données par l’administration fiscale concernant les activités éligibles au CIR. Néanmoins quelques mises à jour sont venues préciser l’environnement fiscal.
En date du 2 Novembre 2016, le BOFiP-I a été étayé d’une précision de la base documentaire qui spécifie que le dépôt d’un brevet ne suffit pas à lui seul à authentifier le projet comme correspondant à de la R&D. L’administration fiscale indique désormais que le brevet correspond davantage à un indicateur de R&D qu’à un élément, dont la présence ou l’absence caractériserait l’existence d’une activité en R&D (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20, 2 Novembre 2016, §330).
Pour aider les entreprises innovantes à déterminer l’éligibilité de leurs projets au CIR, l’Etat a mis en place un assouplissement de la réglementation concernant le rescrit fiscal. Rappelons que le rescrit permet aux entreprises s’interrogeant sur l’éligibilité d’un projet d’obtenir une décision explicite de l’administration fiscale. Le délai de traitement d’une demande de rescrit est de 3 mois et permet, a priori, aux entreprises d’obtenir un avis avant que celles-ci n’aient un engagement financier dans le projet.
En date du 5 octobre 2016, la mise à jour vise à favoriser le développement des entreprises innovantes, en instaurant le « rescrit roulant ». Le rescrit roulant permet aux entreprises ayant déjà obtenu un rescrit fiscal validant l’éligibilité de leur projet au CIR, d’assurer la continuité de ce rescrit en cas d’évolution du projet initial. La mise en place de cette mesure permet désormais aux entreprises de bénéficier d’une plus grande souplesse dans l’exécution de leurs projets et surtout de se prémunir contre le risque de redressement fiscal. (BOI-SJ-RES-10-20-20-20, 5 Octobre 2016, §20)

 

Les dépenses retenues lors du calcul des droits au CIR

Lorsqu’un projet est reconnu comme éligible au CIR, la difficulté qui persiste est d’identifier quelles sont les dépenses qui peuvent ou non être prises en compte dans le calcul.
Une mise à jour de la base du BOFiP-Impôts du 7 Décembre 2016 a éclairci en partie la nature des dépenses ouvrant droit au CIR. À l’ordre du jour, ce sont les dépenses de personnel, les frais de fonctionnement ainsi que les dépenses de recherche sous-traitées dont il était essentiellement question, dans les sections 2, 2.5 et 3 (BOI-BIC-RICI-10-10-20,20160706).

Les précisions apportées dans cette importante mise à jour participent à la volonté de clarification des textes légaux.
Nous savions que pour être éligible, un projet devait obligatoirement être réalisé sous la conduite d’un chercheur, qu’il soit scientifique ou ingénieur. Dans la récente mise à jour, une définition plus précise a été donnée :

  • Les chercheurs sont « des scientifiques ou des ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. »
  • Les ingénieurs sont « les salariés qui, sans remplir les conditions de diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise »
  • Les scientifiques sont des «  titulaires d’un diplôme de niveau master au minimum ou d’un diplôme équivalent »

Ces précisions, concernant la détention ou non d’un diplôme, permettront d’écarter les risques de mauvaise interprétation ou d’interprétation trop restrictive, pouvant être relevés en cas de contrôle.
Outre le statut de chercheur, c’est le statut de technicien de recherche qui est également précisé. Désormais, l’administration fiscale considère le technicien de recherche comme étant la personne qui «  travaille en étroite collaboration avec les chercheurs, pour assurer le soutien technique indispensable aux travaux de recherche et de développement expérimental ». La nouvelle définition de technicien de recherche laisse de côté la notion de diplôme pour s’intéresser à la tâche réalisée.
Le texte légal prévoit également que, désormais, les stagiaires et les apprentis pourront également être considérés comme des techniciens de recherche dans le calcul de l’assiette du CIR.
En ce qui concerne les jeunes docteurs, deux solutions favorables ont été apportées. D’une part, les dirigeants d’entreprise, à condition qu’ils participent personnellement aux opérations de R&D, pourront être considérés comme jeunes docteurs. D’autre part, la rupture de la période d’essai pour un Jeune Docteur ne remet pas en cause son statut pour son prochain emploi et ce,  pour la période restante.

D’après le guide du CIR 2016 :Lorsque les dépenses de personnel se rapportent à des personnes titulaires d’un doctorat ou d’un diplôme équivalent, elles sont prises en compte pour le double de leur montant pendant les vingt-quatre premiers mois suivant leur premier recrutement, à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l’effectif du personnel de recherche salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente. Il n’y a aucune condition sur le délai écoulé entre l’obtention de la thèse et la signature du premier CDI. 

Nous rappelons que ces définitions sont en contradiction avec la décision de la CAA de Paris rendue le 7 Novembre 2013.

 

Pour les dépenses de recherche externalisées

En dépit de certaines attentes, l’administration fiscale a maintenu sa position relative aux dépenses de recherche sous-traitées. Les sous-traitants désirant déclarer eux-mêmes leur CIR sont toujours tenus de soustraire de la base imposable le montant des factures émises envers l’entreprise ayant un projet de R&D éligible.
Ce cas a été conforté par la jurisprudence. La Cour administrative d’appel de Versailles a jugé dans l’affaire Altran Technologies que les dépenses de recherche engagées par une société non agréée doivent être exclues de l’assiette de son crédit d’impôt recherche dès lors qu’elles sont refacturées à des filiales du groupe. (CAA Versailles, arrêt du 29 novembre 2007, n° 05VE01865). En 2016, la demande d’appel  de la société n’a pas franchi l’étape d’admission devant le Conseil d’Etat (CE, 20 Octobre 2016, n°395305). Cette décision a fixé de nombreuses entreprises innovantes dans le même cas.

 

Le Crédit Impôt Recherche Collection

Rappelons tout d’abord les caractéristiques du Crédit Impôt Collection. D’après l’administration fiscale : « les dépenses relatives à l’élaboration de nouvelles collections des entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir sont éligibles au dispositif du Crédit Impôt Collection, intégré dans le Crédit Impôt Recherche ».
Pour beaucoup, le caractère industriel d’une entreprise n’était pas forcément évident à définir. En 2016, plusieurs juridictions ont tranché cet aspect, en décidant de l’octroi ou non du CIR Collection à l’entreprise qui en avait fait la demande. Mais le 27 octobre 2016, le débat est relancé suite au reçu au greffe du Conseil Constitutionnel, qui soulève une absence de conformité de la Constitution. L’administration fiscale, en réservant le bénéfice du CIR Collection aux seules entreprises industrielles aurait une position anticonstitutionnelle. Suite à la décision du Conseil Constitutionnel, le Ministère devrait se positionner sous peu …

 

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Références

 

Dans son article 45, le projet de Loi de Finances pour 2017, prévoyait une prorogation du dispositif de soutien aux Jeune Entreprise Innovante (JEI) jusqu’en 2019.Le 29 décembre 2016, ce projet de loi a été étudié à l’Assemblée Nationale et a été présenté dans le Journal Officiel n°0303 précisant la loi n°2016-1917. Sans surprise, la prorogation du dispositif JEI jusqu’au 31 décembre 2019 a été actée. Les entreprises créées avant cette date et qui respectent les autres conditions de la JEI peuvent donc continuer à y prétendre.
Pour rappel, ce dispositif créé en 2004 devait s’arrêter au 31 décembre 2013 et avait déjà été prorogé une première fois par la Loi de Finances de 2014 jusqu’au 31 décembre 2016. Nous attendions depuis quelques mois que le gouvernement statue à nouveau sur l’évolution de ce dispositif qui prend de plus en plus d’ampleur depuis sa création.
 

Les principes généraux du statut JEI

Le statut spécifique de « Jeune Entreprise Innovante » (statut JEI) est accordé aux petites et moyennes entreprises respectant certains critères :

  • être créées depuis moins de 8 ans
  • être détenues à hauteur de 50 % au moins et de manière continue par des personnes physiques, des entreprises du secteur du capital-risque, des associations ou des fondations reconnues d’utilité publique à caractère scientifique, des établissements publics de recherche et d’enseignement et leurs filiales ou d’autres JEI
  • être qualifiées de PME, c’est-à-dire : employer moins de 250 salariés et réaliser un chiffre d’affaires inférieur à 50 M€ (ou disposer d’un total de bilan inférieur à 43 M€)
  • réaliser des dépenses de R&D représentant au moins 15% de leurs charges

Les entreprises qui correspondent aux critères énoncés peuvent bénéficier en retour de certains avantages fiscaux :

  • une exonération d’impôt sur les bénéfices, de 100% pour le premier exercice fiscal bénéficiaire, puis de 50 % durant l’exercice fiscal bénéficiaire suivant
  • une exonération, pendant sept ans, de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) et de la contribution économique territoriale (CET) sur délibération des collectivités territoriales

Rappel : pour les exonérations sociales, la précision de l’URSSAF, dans la Lettre circulaire du 20 octobre 2015 de l’ACOSS, indiquait que les salariés doivent être affectés majoritairement.
 

Prorogation du statut JEI : le motif invoqué par l’assemblée ?

Voici ci-dessous l’extrait de l’article 45 de la Loi des Finances 2017 introduisant l’exposé des motifs qui ont conduit à la validation de la prorogation du statut JEI jusqu’en 2019 :

« Le dispositif des jeunes entreprises innovantes (statut JEI) permet à de jeunes entreprises petites et moyennes (PME) créées jusqu’au 31 décembre 2016 de bénéficier d’exonérations d’impôt sur les sociétés (IS) et, sur délibération des collectivités, d’impôts directs locaux. Le dispositif comprend en outre un volet social consistant en une exonération de cotisations sociales patronales s’appliquant les huit années suivant la création de l’entreprise, quelle que soit la date à laquelle celle-ci est intervenue. Depuis sa création en 2004, ce dispositif de faveur a connu divers ajustements consistant à étendre et accentuer les exonérations sur les cotisations sociales tout en réduisant parallèlement la durée des exonérations fiscales. L’efficacité de ce dispositif, aujourd’hui stabilisé, est largement reconnue. La Commission Européenne a réalisé une analyse comparative des dispositifs d’incitations fiscales à la recherche et développement au sein de 26 pays membres en 2014. Cette étude classe le dispositif français de soutien aux JEI en première position à l’échelle européenne. C’est pourquoi et afin de donner de la visibilité aux créateurs d’entreprises innovantes, le présent article vise à proroger ce dispositif d’exonérations fiscales, à périmètre constant, jusqu’au 31 décembre 2019. Cette mesure n’emporte pas de conséquence sur le dispositif d’exonération sociale. »

 

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L’Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (ACOSS) a apporté de nombreuses précisions sur l’exonération applicable au titre de la Jeune Entreprise Innovante dans sa Lettre circulaire du 20 octobre 215 n°2015-48.
Cette précision rappelle certains points portant sur la définition d’une Jeune Entreprise Innovante, la procédure de rescrit, les plafonds applicables, la condition indispensable d’être à jour de ses obligations sociales mais surtout les emplois concernés par l’exonération et leur seuil d’implication aux activités de R&D. Ce « niveau d’implication » remet en question certains aspects du statut JEI, décryptés pour vous dans cet article.

La nouvelle définition du seuil d’implication aux activités de R&D

Au-delà de la liste des catégories de personnel qui sont concernées par l’exonération, cette nouvelle précision attire notre attention sur la définition suivante :

« L’exonération est ouverte par la loi aux salariés […] dont l’exercice des fonctions conduit à une implication directe dans le projet de recherche et de développement. »

Ce niveau d’implication n’étant pas explicitement précisé par les textes, et il convient d’en retenir une interprétation juste et équitable. Ainsi, on comprend que le bénéfice de l’exonération au titre d’un salarié sera considéré comme acquis dès lors que la moitié de son temps de travail au moins est consacrée à un ou des projets de R&D.

Justifier de la bonne application du texte

En-deçà de ce repère des 50%, les employeurs pourront être conduits à justifier de la correcte application de l’exonération, au regard notamment de la quotité de travail consacrée aux activités de R&D dans leur entreprise ou bien du lien effectif avec les activités effectuées par le salarié dans d’autres domaines que ceux de la R&D (par exemple l’exploitation commerciale du projet de R&D auquel le salarié peut consacrer une part significative de son temps de travail).
Il conviendra également de vérifier si l’activité de R&D éligible, sans être majoritaire, constitue l’activité principale du salarié. Enfin, en cohérence avec la nature de l’exonération (qui porte sur la totalité du salaire) il ressort de la lecture de ce texte que les salariés qui se consacrent marginalement à des activités éligibles ne peuvent être considérés comme ouvrant droit au bénéfice de l’exonération.
Or, pour les entreprises qui ont déjà bénéficié du statut JEI, il est nécessaire d’être attentives sur le fait que comme toute précision réglementaire, elle est d’application rétroactive, c’est-à-dire que la règle devait être appliquée comme précisée. Ainsi, lors de prochains contrôles de l’URSSAF, cela veut dire que les salariés non affectés majoritairement à des opérations de R&D, ne peuvent bénéficier des exonérations accordées par le statut JEI et ce pour les années antérieures !
Pour les Jeunes Entreprises Innovantes ayant déjà établi leur demande, cette précision peut donc s’avérer très douloureuse …

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L’équipe d’Innovatech Conseil accompagne les Jeunes Entreprises Innovantes à interpréter les textes légaux dans le cadre des demandes de CIR, CII et statut JEI . Pour cela, il suffit de prendre contact avec nous.